Un bateau sur la Marne

Après des longs mois d’exploitation des matériaux, notes, documents accumulés trois ans durant, Gérard Rondeau vient d’achever un livre, « La Grande Rivière Marne » – éditions La Nuée Bleue -, premier volet de son portrait général de la rivière Marne.
La grande majorité des textes proposés dans ce livre sont tirés des entretiens filmés sur la péniche, sur le pont et, en cas de trop mauvais temps, dans le couloir de la soute. Le report et le script des bandes vidéographiques ont été longs, environ huit cents pages retranscrites, seule une partie des entretiens a pu être gardée.

Que celui ou celle qui ne retrouvera qu’un extrait de ses propos soit indulgent avec les morceaux choisis.
Original et très documenté, ce grand livre de la Marne est la première pièce d’un véritable travail de mémoire sur la plus longue rivière de France.

Le 9 décembre 2010, à 18h, dans le cadre du festival « Scènes d’Europe », Gérard Rondeau a présenté à la Comédie de Reims quelques extraits du livre ainsi qu’un premier montage des vidéos réalisées sur le Bateau sur la Marne.

© Opération Un bateau sur la Marne – Gérard Rondeau
© Musique – Libelul

« L’eau parle sans cesse et jamais ne se répète. »

Nous avons eu le temps de vérifier la poésie et la justesse de cette phrase d’Octavio Paz pendant les 45 jours que nous avons passés sur le bateau.

Plus de cent cinquante personnes sont venues sur le pont de la péniche pour évoquer leur rapport à la rivière :
Simples riverains, mariniers, historiens, cuisiniers,  académicien, élèves, professeurs, hommes politiques, artistes,  écrivains, maires des communes des bords de Marne, éclusiers, ouvriers, architectes, agriculteurs, retraités, industriels, passionnés de faune, de flore et de botanique, défenseurs de l’environnement, habitués des guinguettes, …, tous sont venus nous parler, au gré du paysage qui défile,  de leur rapport à la rivière.

La deuxième phase du projet est donc en cours : numérisation et dérushage de toutes les vidéos HD, élaboration du script, retranscription des entretiens, tirages et scans des photos… tout cela, en vue d’un projet éditorial, vidéographique et photographique.

Certes un peu submergés par la Marne, nous n’en perdons pas pour autant la maîtrise du sujet et notre enthousiasme.

Gérard Rondeau présentera pour la première fois son projet le 9 décembre 2010 à la Comédie de Reims -direction Ludovic Lagarde-, dans le cadre du festival Scènes d’Europe.

Les derniers jours précédant notre arrivée à la confluence de la Marne à la Seine ont été riches en découvertes et en rencontres, à Meaux, Lagny-sur-Marne, Chelles, Nogent-sur-Marne, Joinville-le-Pont, Bonneuil, Maisons-Alfort…

Le 31 mars, à 18h, nous passions Charenton-le-Pont, là où les eaux de la Marne se mêlent à celles de la Seine, et après 45 jours et 45 nuits sans quitter la péniche, à la tombée du jour, nous sommes entrés dans Paris par un vent glacial.

Nous  y avons reçu un accueil chaleureux de tous ceux et celles présents à nous attendre sur le quai, au Port Saint-Bernard ; des gens venus de Paris naturellement, mais également du Val-de-Marne, de l’Aisne, de la Marne, certaines personnes ayant même fait le trajet depuis la Haute-Marne.

Nous profitons de cette occasion pour remercier vivement le Port Autonome de Paris de nous avoir autorisés exceptionnellement à nous amarrer près du Jardin des Plantes.

Nous avons ainsi clôturé comme il se doit, entre partenaires et amis, cette longue remontée de la rivière. Cette « expédition » n ‘aurait pu se réaliser sans un travail en équipe placé sous le signe de l’efficacité et de la convivialité, qui a donné un résultat au-delà de nos espérances.

525 km pendant lesquels, tôt le matin jusqu’à tard le soir, toutes les personnes rencontrées depuis Balesmes se sont prêtées avec patience et enthousiasme au jeu des entretiens sur le pont du bateau.

Nous ne saurons trop le répéter : ce projet n’aurait pu se réaliser sans le soutien bienveillant de tous nos partenaires.
Un grand merci à la Caisse Mutuelle Marnaise d’Assurance (CMMA) qui a été notre premier et principal soutien dans ce projet et qui nous a accompagnés avec attention tous ces derniers mois.
Nous tenons aussi à remercier chaleureusement la Région Champagne-Ardenne, le Conseil Général de la Marne, le CIC Est, l’Association des maires de la Haute-Marne, de la Marne et du Val-de-Marne,  la Communauté de Communes de Châlons-en-Champagne;
Ainsi que la Comédie de Reims, Nicolas Feuillatte, Bernardaud, l’Union, Le Journal de la Haute-Marne,
TV 2 semaines, le 2e Bureau, Champagne Création, Dupon, Compo Rive Gauche, et l’Agence Vu.

De la rivière à la terre ferme, nous ne manquerons pas de vous tenir informés, via le blog,  des suites de ce projet.

Monter sur le bateau sur la Marne, c’est sortir d’un temps « t » et d’un lieu « x » donnés.

Les secondes s‘écoulent plus lentement.
On oublie très naturellement montre et chronomètre.
La traversée des villages, des villes et des paysages du milieu de la rivière offre à l’œil une perspective nouvelle.
Après une nuit à bord de la péniche, mettez un pied à terre dès votre réveil et vous aurez une étrange sensation de vertige.
Vous êtes, pour un temps, déconnecté.

Plus concrètement, c’est notre connexion Internet qui nous a fait défaut pendant toute cette semaine, et nous n’avons pas été en mesure de tenir quotidiennement notre carnet de bord.

En attendant de le compléter, voici les dernières escales du voyage :

Samedi 27 mars :
Nogent-sur-Marne

Du dimanche 28 mars au lundi 29 mars :
Joinville et ses environs, et les demi-tours calculés au millimètre près par notre pilote

Mardi 30 mars :
Maisons-Alfort

Mercredi 31 mars :
Arrivée à Paris
Amarrage au Port Saint-Bernard

Nous avons aménagé le pont pour faire place aux chanteurs et musiciens qui ont transformé, le temps de quelques biefs, le bateau sur la Marne en guinguette sur la Marne, juste le temps d’appliquer à la lettre ce dicton :
« La vie, c’est comme une note impromptue de Schubert » ;
Et dans un autre registre d’entonner en boucle :

« Pour le départ de Paris,

Du France et du Normandie

Pour fêter la Saint-Vincent

Noël et le Jour de l’an

Il pétille le Champagne

Coule, coule en cascade,

Venez, venez, camarades,

Buvons et chantons… en chœur ».

Le 27 mai, les Allemands attaquent et percent jusqu’à Dormans. Du 21 juin au 15 juillet le front est stabilisé le long de la Marne…
La rivière a la mémoire douloureuse, et lorsqu’on la retire de son lit, les riverains, historiens, passionnés,…, la fouillent et la retournent. Certains d’entres-eux sont tombés sur des coupe-coupe sénégalais.

Au cours de la seconde bataille de la Marne, on comptait neuf bataillons de tirailleurs sénégalais, qui avaient en dotation cette arme en plus de l’équipement français. Selon certaines légendes, le coupe-coupe servait à couper les oreilles des Allemands : à chaque oreille rapportée, une prime donnée.

Mais n’en déplaise à Quentin Tarantino, ces légendes sont infondées. En effet, les tirailleurs sénégalais étaient envoyés sur des assauts violents mais brefs. S’ils prenaient le temps de couper les oreilles des Allemands, l’assaut se serait arrêté.
A la fin de la guerre, on a ramassé des quantités de coupe-coupes qui ont par la suite servi à la récolte de betteraves. C’est ainsi que cet outil est entré dans la collection agricole champenoise de la vallée de la Marne.

Sur les pas de Simenon et du commissaire Maigret…

« Des faits le plus minutieusement reconstitués, il ne se dégageait rien, sinon que la découverte des deux charretiers de Dizy était pour ainsi dire impossible.

Le dimanche –c’était le 4 avril -, la pluie s’était mise à tomber à verse dès trois heures de l’après-midi.

A ce moment, il y avait dans le port, au-dessus de l’écluse 14, qui fait la jonction entre la Marne et le canal latéral, deux péniches à moteurs avalantes, un bateau en déchargement et une vidange.

Un peu avant sept heures, alors que commençait le crépuscule, un bateau-citerne, l’Eco III, s’était annoncé et avait pénétré dans le sas (…) »

A deux jours de notre passage du canal à la rivière Marne, notre course en Freyssinet a été freinée par les directives des VNF, voies navigables de France.

Horaires d’hiver doublés des élections, les feux de l’écluse étaient éteints.

Nous avons donc mis à profit cette halte imprévue en mettant pied à terre et sommes allés à la rencontre des footballeurs de Tours-sur-Marne.

Malgré leur défaite contre Mareuil-sur-Aÿ, c’est avec entrain qu’ils ont lancé leurs « cris de guerre » sur le pont du bateau.

A charge de revanche !

DEPART PREVU LE 23 FEVRIER
DE MAREUIL-SUR-AY A CHALONS

Après un portrait très personnel de la rivière découvert lors de l’exposition « Vues Sur Cours, voyage au bout de la rivière Marne », Gérard Rondeau souhaite descendre en bateau le cours de la Marne depuis sa source jusqu’à Paris. L’idée est d’installer un studio sommaire sur le bateau et d’aller à la rencontre des hommes. Une halte dans chaque port, un accostage dès que les berges le permettent, afin de croiser le chemin d’une centaine de riverains tout au long des 525 kilomètres de la Marne.

Soit un mois sur un bateau, à accumuler notes et documentation venant étayer une série d’entretiens filmés, à tirer des portraits, et à réaliser une vidéo de l’aventure sous formes de journal, de carnet de voyage. La dimension humaine ajoutée au portrait de la Marne, va permettre à Gérard Rondeau de clore son travail, pour finalement proposer un abécédaire intime, une sorte d’inventaire curieux, presque un dictionnaire amoureux de la Marne.

A l’abordage de la Marne !
(si les glaces veulent bien fondre d’ici là)